Les déferlantes
Quand j’étais ado, j’adorais partir » à l’Océan » pour pouvoir enfin sauter par dessus les vagues . On rigolait beaucoup. Parfois on se prenait une claque quand on n’avait pas vu la vague venir et on se retrouvait trempés, à s’essuyer le visage, écarter le maillot pour faire sortir le sable. C’était inattendu et joyeux.
Parfois on était carrément emportés par la vague et on se retrouvait quelques mètres plus loin, un peu essoufflés, un peu penauds aussi de s’être fait avoir, on avait les cheveux tout collés par le sel, on buvait la tasse et tout ça avait un air de vacances.On en parlait après, on se moquait les uns des autres et si un se moquait trop, hop on le balançait dans les vagues et on lui tournait le dos.
Démerde toi maintenant !
On détalait à toute allure pour regagner nos serviettes et continuer à se faire dorer au soleil.
Les surfeurs attendaient la vague pour attraper la crête et n’en finissaient plus de zigzaguer, les bras tendus dans la recherche de l’équilibre. Ils étaient beaux, bronzés, les cheveux longs. Nous les ados, on les attendait sur la plage, on riait bêtement, on se poussait du coude, on chuchotait des commentaires et on guettait l’oeillade, le regard en coulisse qui signalait que peut être, le beau gosse là, on allait être dans ses bras, dans les soirées de la plage, autour du feu de camp, avec la guitare et tout.
Voilà, c’était ça les vagues de l’Océan.
Aujourd’hui les journaux titrent » A quand la deuxième vague ? « , » Des plans pour affronter une deuxième vague » , » Une deuxième vague inévitable » , » La deuxième vague à la rentrée » .
Les déferlantes…
On se prend à regretter que la mer de l’actualité ne soit pas d’huile.
La deuxième… On nous la prédit plus terrible que la première et peut être moins terrible que la troisième et les autres qui devraient suivre …
Ces vagues qu’on attend, on ne les espère plus, elles nous désespérent.
On en a du vague à l’âme et des bleus sur le visage.