
Les mots bleus
( Le genre du roman policier ou de la nouvelle policière est un genre que j’ai toujours ignoré, non pas tant dans la lecture : je lis des polars, mais dans l’écriture. Je me suis donc amusée à écrire un début de roman policier auquel je mêle quelques références poétiques que ceux qui savent reconnaitront ! Bonne lecture ! )

Habituellement dans les bons polars l’assassin est toujours sur le lieu du crime. A la fois témoin, enquêteur parfois, policier même, suspect, proche de la victime etc… bref la dernière personne a être soupçonnée parce que non, allez ce serait trop facile, non mais n’importe quoi, pas lui ( elle ) etc…
Habituellement dans les bons polars…
Et là je vous propose justement un début de polar, juste pour goûter je veux dire, une mise en bouche en quelque sorte, un apéro comme ils disent dans le Sud, un avant » pastaga « …
Antonio n’est pas le dernier des cons. Cela fait à présent huit ans qu’il est dans la rue. La rue, il la connait comme sa poche. Jamais une goutte d’alcool, un joint, rarement une clope. » La rue a fait de moi un homme » aime-t’il à répéter. Ses potes, des pauvres types, qui un jour, comme ça, ont tout perdu, l’enchainement infernal mais des pauvres types qui tiennent debout.
Le plus dur c’est la nuit : ceux qui sont cuits dorment à même le sol, tombent là où l’ivrognerie les aura laissés .
Les autres, les camés,ils sont dans les squats.
Le haut du panier, ceux qui comme Antonio ont gardé une sorte d’éthique, une certaine idée de la cloche, ceux là ils sont dans les foyers.
Pas n’importe lequel, ici à Lyon.
Le foyer des Artistes. Un ancien atelier d’artistes mis à disposition pour eux, pour la création et puis lentement il s’est vidé, le foyer, les artistes sont partis ailleurs, ou ont renoncé : c’est si difficile de se faire un nom. Et puis la bohème c’est d’abord crever la dalle, alors parfois on renonce, c’est comme ça que les histoires de vie s’écrivent pour certains : une succession de renoncements.
Une association de la ville l’a acheté et là, voilà, c’est devenu une sorte de lieu privilégié de ceux que la rue n’a pas dévorés. Des box ont été aménagés pour » préserver l’intimité de chacun « , c’est ce qu’a dit Gérard Collomb pour l’inauguration, » un espace de convivialité où chacun pourra trouver une écoute, une main tendue, un regard bienveillant » .
Au dessus de la porte d’entrée, à coté de la plaque,
LE FOYER DES ARTISTES A ETE INAUGURE LE 6 OCTOBRE 2010 PAR GERARD COLLOMB MAIRE DE LYON
il y en a qui ont écrit, comme ça en travers : Tous des enculés à la ville et puis un autre : Ville de merde et puis plus loin : merde toi même, bref, un peu comme les chansons de l’enfance quand on reprenait le dernier mot : j’en ai marre, marabout, bout de ficelle, selle de cheval …
Ils se répondent, entre eux, à livre ouvert, au petit bonheur l’inspiration, ils font du street art finalement sans le savoir, une manière de permettre au lieu de garder sa vocation première, c’est ce que pense Antonio.
Le personnage principal.
Antonio qui n’est pas le dernier des cons.
Et c’est là que l’histoire commence, car c’est ce que tu attends, lecteur, qu’il démarre ce récit, avec des morts et du sang, de l’amour aussi peut être, comme une trainée.
Justine est arrivée en décembre au foyer, côté femmes. Pour l’état civil Justine a 17 ans, mais pour le foyer, 18. Un copain lui a trafiqué sa carte d’identité. Elle a quitté Rouen il y dix jours, dix jours de stop, dix jours à dormir au bord des routes, roulée en boule avec Rimbaud dans la tête et » les étoiles au ciel qui font un doux frou-frou « , les 17 ans de Rimbaud, ses fugues, tout ce que leur a raconté la prof de français et qui peut être lui a donné envie de se tirer, un soir, comme ça.
Oui c’est là que l’envie est née et trois jours plus tard…
Antonio a rencontré Justine trois jours après son arrivée. Elle avait l’air assez largué pour qu’il la remarque, sale aussi, mais belle, si belle. Comme un bijou dans ce sale écrin. De l’or sur un tas de boue.
Au foyer on respecte Antonio. Déjà, on a intérêt. Antonio c’est un peu notre parrain à tous. Le sage aussi, celui qu’on écoute, alors quand on a vu qu’Antonio avait le béguin pour Justine on a tous été heureux, oui, je crois que pas un d’entre nous n’a pensé alors que les choses allaient se terminer comme ça , ou commencer… Pas un, enfin, je crois…
C’est Pierre-Louis qui a retrouvé Justine, hier. Elle était dans le bosquet, tu sais derrière le deuxième bâtiment, on aurait dit qu’elle dormait si je te jure » pâle dans son lit vert.. bouche ouverte, tête nue et la nuque …. »
Elle portait une robe de mariée…
Dominique Mallié
Et pour commander Voyage en Ménopausamie, chroniques de la cinquantaine débridée, c’est par là : Mallie.dominique @orange.fr ou dans la partie » Message personnel » du blog qui vous est dédiée . Merci !

