Un peu de moi

Matteo a 20 ans demain…

Voilà, tu rentres du ciné . C’est la fête à la maison . Matteo a 20 ans demain . Tu toques à la porte doucement pour voir si tout va bien. La porte de la chambre. Ils sont là les copains et Matteo , le cendrier plein de clopes, une bouteille de whisky, ils jouent à des jeux vidéos, ils parlent, ils boivent, ils fument.
Matteo a 20 ans demain. Bizarrement c’est toi qui as la tête qui tourne un peu. Les copains t’embrassent, ils te tutoient d’un coup peut être à cause du jean que tu portes. Ou la veste ou je ne sais quoi dans ton attitude, ou l’alcool peut être qui font que voilà, maintenant après toutes ces années où tu les as vu grandir, un à un et Matteo avec et surtout, et bien maintenant ils s’autorisent ça.
Matteo a 20 ans demain . Ironie : tu viens de voir le film «  Nous finirons ensemble « et tu te demandes à qui tu pourrais dire ça aujourd’hui .
Tu penses à ce jour où il est né, facilement, le troisième, comme une lettre à la poste et à ce drôle de bonnet qu’on lui avait mis parce qu’il avait froid, ce tout petit bout, qui tout contre toi, te dévorait des yeux.
Matteo a 20 ans demain . Tu aurais une fille, tu lui aurais chanté la chanson :  »  Votre fille a 20 ans Madame, que le temps passe vite Madame, hier encore elle était si petite … » 
Matteo a 20 ans demain . Elles te pètent au visage ces années passées.
Tout revient. Le tout petit garçon qui faisaient râler les «  dames «  de la crèche, les instits de l’école, les profs du collège et du lycée. L’adolescent que tu regardais partir dans des soirées jusqu’au bout de la nuit :  »  Mais non, maman, je vais rentrer tôt : juste 3heures du mat, t’inquiète…  »
La flûte à l’école que tu n’as jamais voulu acheter, les colo où il partait en pleurant, toutes ces années à dormir sur un matelas qu’il trainait le soir dans ta chambre, tous ses petits mots qu’il te faisait passer sous les portes, qu’il déposait vite sur ton bureau avant de fuir dans une autre pièce, pour te demander si tu voulais bien que ce soir encore, il dorme près de toi.
Matteo a 20 ans demain . Tu ne fais que ça t’inquiéter et être fière de lui. Tu vois c’est ça une mère : entre inquiétude et fierté et la tendresse toujours et l’amour par dessus tout.
Matteo a 20 ans demain . Tu entends sa voix derrière la porte, une voix d’homme, presque.

C’était hier qu’il muait et sa voix déraillait.
Hier.
Il continue dans ses textos à t’appeler  » Mamounette « , à t’envoyer des smileys qui envoient des baisers.
Hier qu’il pleurait doucement derrière ses lunettes de soleil quand il ratait un examen, hier, la première cigarette, le tatouage si discret au dessus du genoux : un parapluie. Hier qu’il se réjouissait justement de la pluie qu’il adore.
Hier, où il restait les bras ballants devant tes chagrins à toi que tu n’arrivais pas à lui cacher. Hier qu’il balayait d’un éclat de rire tes angoisses que tu avouais.
Hier qu’il te disait que oui, il reviendrait vivre avec toi dès le mois de juillet et tu pleurais de joie de l’avoir à nouveau près de toi.
Hier, les chatouilles, la joue qu’il essuyait quand tu l’embrassais : Et si il allait partir au lycée avec du rouge de sa mère ? La honte.

Matteo a 20 ans demain.

Dominique Mallié

14 commentaires

  • Dominique

    Bonjour,
    Je suis un homme. Je vous suis sur vos blogs de femmes et j’apprécie la fraicheur de vos émotions..Sans fard.Les hommes devraient être plus proches des femmes pour les écouter et les comprendre.
    Ce doit être mon coté féminin qui parle.
    J’aime la simplicité et la franchise de vos mots quand vous parlez de l’âge, de sexualité.
    Vous respirez la féminité et la sensualité.
    Je souris à vous lire.
    Un homme que vous auriez pu croiser il y a trois ans..

    • Dominique

      Merci Dominique pour votre commentaire. En effet, il est bon de se rendre compte de cette nécessaire proximité. Un couple est aussi une histoire d’amitié comme je le dis dans un de mes articles en sus d’une histoire d’amour. Mais autant on choisit ses amis, autant on ne choisit pas son amour. On va donc dire que l’amour préexiste et que l’amitié vient se greffer sur cet amour. Enfin c’est mon sentiment ( si je peux dire 🙂 Ravie de vous avoir fait sourire, un blog c’est du plaisir partagé : celui de l’écriture et celui de la lecture. A bientôt

  • Natchoune

    Et bien voilà… un nouveau passage, un nouveau cap… quel magnifique texte Dominique… je suis très très émue par tous ces mots alignés…. MERCI

    • Dominique

      Ils font écho à ce que nous vivons, on en franchit des caps Nathalie ! La vie est un océan pas très tranquille et c’est tant mieux ! Merci pour ton commentaire qui me touche !

  • Sapiens

    Que d’émotions qu’on ne peut pas totalement libérer en leur présence. Tu nous renvoies avec élégance à nos propres émotions, à nos propres deuils de leur jeunesse, de notre jeunesse. Chacun de mes 4 fils a eu 20 ans, et à chaque fois une émotion sourde. Quoi leur dire pour qu’ils prennent la bonne route, quoi encore leur transmettre qu’ils veuillent bien entendre, comment ne pas être pesant avec nos recommandations de vie, nous qui n’avons pas toujours été exemplaires.

    A chaque fois je suis revenu vers le poème de Kipling si important, un idéal: « tu seras un homme mon fils ». Et là je le relis, et là le père que je suis s’autorise une larme sur sa propre vie.

    • Dominique

      Merci pour ce touchant commentaire . Oui, on a plus l’autorité à cet âge, on se ferait rabrouer ; dire ce qui serait bien pour eux c’est se référer à nos expériences de vie qui ne valent que pour nous et comme vous le dites : nous n’avons pas toujours été, et ne sommes pas toujours exemplaires. Entourée de mes fils beaucoup plus grands que moi à présent je me sens protégée par eux et c’est un peu comme si les choses s’étaient faites naturellement. ..Alors, oui, ce sont des hommes mais on les serre encore très fort contre soi … 🙂 ( merveilleux poème de Kipling, merci de le rappeler ! )

  • Catherinesentimots

    Ah…. le petit dernier ! Pour moi aussi c’est un fils, 198 cm actuellement, le plus grand de la fratrie.
    26 ans qui ont filé très vite, mais tant d’amour autour de moi à travers mes 4 « petits »
    Merci

    • Dominique

      Les relations changent mais l’amour qui se dit et se montre différemment est toujours là .. Quelques claquements de portes parfois ou des commentaires un peu vifs, mais tout rentre dans l’ordre très vite. Le propre d’une famille qui fonctionne harmonieusement ; merci Catherine, un beau dimanche à vous !

  • Lili

    C est avec émotion que j’ai lu ton texte Dominique. Une belle émotion ! Geoffroy à 26 ans mardi.. Le petit dernier celui que je prenais sans cesse en photo enfant celui que je regardais dormir car je savais qu il serait le dernier et que le temps passe si vite.. Aujourd hui il est toujours à mes cotés dans une autre partie de la maison c’est une présence légère, chacun de nous ayant ses occupations entre travail et activités, mais tous ces moments partagés, ces repas, ces discussions, ces sorties et ces voyage comme l’Italie l’an passé et notre passion commune pour l’histoire sont tellement précieux. Malgré sa barbe et sa grosse voix je ne m’explique pas pourquoi lorsque je le regarde le temps n’a pas de prise sur nous..

    • Dominique

      Et oui, n’avoir que des fils qui ont de la barbe est le signe qu’on a basculé dans une autre période 🙂 Merci Lili pour ce touchant commentaire, des bises !

  • Nathalie

    Encore un très joli texte, tellement réaliste. Merci Dominique pour ces mots bien choisis, plein d’émotions et d’avenir aussi. On est toutes au même point !!! 🙂 J’espère que tu es en forme. Bon dimanche ! Bises Bises.
    Nathalie.

    • Dominique

      Merci Nathalie, oui en effet … toutes au même stade ! oui, très en forme , je viens bientôt, bientôt comme dit par ailleurs, des bises et un beau dimanche aussi à toi ! 🙂

      • Dominique

        On les a portés, serrés si fort dans nos bras, tenu leur main, écoutés jusqu’à tard dans la nuit, surveillés, veillés sur eux et puis un jour on a ouvert les bras et ils sont partis,pas très loin parfois, parfois très loin et toujours ils reviennent . Paul Nizan écrivait : « J’avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel âge de la vie.Tout menace de ruine un jeune homme : l’amour, les idées, la perte de sa famille, l’entrée parmi les grandes personnes  » . Les temps ont changé, ils ont l’insolence de la jeunesse et une foi en l’avenir , le reste la vie leur apprendra… J’ai vêcu un drôle de moment hier soir en effet et cette nostalgie était perceptible dans ce que j’ai écrit. Les pages se tournent, on aimerait retenir le temps et puis on fait avec. Merci pour votre commentaire, bonne fin de soirée !

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