Colifichets et mode

On peut parler de tout mais à un moment il faut mettre du rouge à lèvres

Si on se farde les lèvres depuis l’Antiquité, depuis un siècle et demi le rouge à lèvres a acquis un statut particulier dans la société. Associé à la féminité, il est aussi bien symbole d’émancipation que d’oppression.

Une femme qui met du rouge à lèvres est-elle de droite ou de gauche ? Féministe ? Superficielle ? Dans la séduction ? Un clown ?Une victime ? Une vamp ? Une obsédéedesonapparence? Bien malin qui pourrait répondre à ces questions. Car au siècle dernier, le rouge à lèvres a été brandi par des femmes aux idéaux et aux convictions parfois radicalement opposés.

Une invention made in France

L’entrée du rouge à lèvres dans le monde moderne date de 1870. Cette année-là, le parfumeur Guerlain invente le bâton de rouge à lèvres, commercialisé sous le doux nom de « Ne m’oubliez pas ». Une révolution et un coup de génie ! Désormais, il possible de se promener avec de quoi se maquiller les lèvres à tout moment. Pratique, l’objet était attendu, mais le succès est discret : se colorer les lèvres n’est pas encore « up to date »

En effet, à l’époque, le rouge à lèvres était associé à la prostitution ou au monde du spectacle. Il faut attendre le début du XXe siècle pour que les regards évoluent. A cette époque, l’actrice Sarah Bernhardt casse les codes, portant du rouge à lèvre sur scène comme à la ville. La démocratisation du rouge à lèvres n’est pas un long fleuve tranquille, mais en quelques décennies, il devient incontournable.

Petit objet, grand sujet

Pendant la Seconde guerre mondiale, le rouge à lèvres sera banni par le régime nazi mais célébré par les Américains comme symbole de la résilience féminine en tant de crise et même déclaré « produit nécessaire au maintien d’une vie moderne » par le gouvernement britannique, au même titre que la bière ou les cigarettes.

Après avoir été présenté comme arme de séduction massive et symbole de la libération féminine, comme étendard militant et patriotique, le rouge à lèvres devient, dans les années 1950-1960, l’indispensable dans le trousseau de la bonne ménagère, mais aussi un symbole d’émancipation pour certaines minorités. Dans les années 1970, il fait son apparition sur les lèvres des hommes dans le mouvement gothique, et, dans la décennie suivante, il devient le symbole de l’hypersexualisation de la représentation de la femme dans la société de consommation.

Quel autre objet peut se targuer de porter avec autant de constance des messages aussi diamétralement opposés ?

QUANT A MOI ?

Puisque je suis le sujet « pensant » de ce blog ?

Donc, il s’agit de parler du rouge à lèvres. A un moment dans ma vie, je voulais être hôtesse de l’air, j’ai suivi une formation chez Air France et le rouge à lèvres était obligatoire.

J’avais vingt ans et je ne dirai pas comme Paul Nizan :  » Je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel âge de la vie » Je dirai : « C’EST le plus bel âge de la vie ». J’étais à Paris, sans un sou, j’achetais mon rouge à lèvres chez Tati. J’adorais Tati, c’était kitsch et pas cher. Les carreaux roses comme le papier des bouchers autrefois.

Le rouge à lèvres je suis, depuis lors, incapable de sortir sans. Même le matin pour aller chercher un pain au chocolat ou prendre mon petit déj en pyjama avec un trench par dessus au café d’à côté, j’ai du rouge à lèvres. Le cheveu en bataille, l’oeil cerné mais du rouge à lèvres.

OBLIGATOIRE.

D’ailleurs mon chien sait que je sors quand il me voit mettre du rouge. Il frétille aussitôt. Nous avons, lui et moi, une vie commune très accès sur les détails.

J’aime le rouge qui laisse des traces a contrario de tout ce qu’on voit çà et là. J’aime voir la trace de mes lèvres sur un verre, sur une joue, de barbouiller mon amoureux de rouge à lèvres ici et là. J’aime le rouge, légèrement brun ou le rouge vif avec le visage nude.

Je crois qu’à notre âge, c’est soit les yeux maquillés, soit la bouche et j’ai toujours préféré la bouche tant le maquillage des yeux peut alourdir un visage surtout quand la paupière commence à tomber.

Une jolie bouche rouge et une dentition soignée, voilà une suggestion qui vaut son pesant d’or en ce milieu de novembre 🙂

« Amusez-vous. Souriez. Et continuez à mettre du rouge à lèvres. » (surtout avec des dents bien blanches) – Diane Keaton

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